Avant de devenir le coeur du quartier japonais de Paris, La rue Sainte-Anne a été ouverte sous Louis XIII en l’honneur de la reine Anne d’Autriche. Elle fait partie d’un nouveau quartier voulu par le Cardinal de Richelieu au nord de son Palais, le “Palais Cardinal”, devenu “Palais Royal”. Cette extension de Paris fut conçue de manière raisonnée, comme un ensemble idéal où les voies furent quadrillées “à la Romaine” autour de l’axe nord-sud formé par la rue Richelieu et l’axe est-ouest formé par la rue Neuve-des-Petits-Champs. Le projet comprend l’édification d’une nouvelle enceinte dite des “Fossés Jaunes” qui incorpore de nouveaux terrains à Paris au-delà de l’enceinte de Charles V. Le roi confie formellement cette tâche à l’un des commis de l’entrepreneur Le Barbier, Pierre Pidou. Le “traité Pidou” est signé le 9 octobre 1631 et constitue l’acte de naissance du quartier Richelieu. Il prévoit qu’en échange de l’édification de l’enceinte, le roi cède les terrains compris entre l’ancienne et la nouvelle limite de Paris. Le Cardinal de Richelieu est bien sûr directement intéressé au lotissement de ces terrains dont il a acquis des parts en prévision du report de l’enceinte. Son obligé, Le Barbier et un secrétaire du Roi, Pierre Desportes de Lignières, vont être les principaux promoteurs du lotissement. Son dessin semble avoir été l’œuvre de Pierre Boyer, payé par Le Barbier et Desportes pour cette tâche.
La rue Sainte-Anne prévue dès 1633 par un arrêt du Conseil et qui fait partie intégrante de ce projet, est ouverte dans les terrains acquis par Desportes. Elle gravit l’ancienne “butte des Moulins”, site encore vierge de constructions au XVIe siècle. La zone est entièrement lotie entre 1643 et 1718, faisant apparaître des maisons remarquables, notamment par leurs décors intérieurs, et leurs escaliers à rampe de serrurerie. Ce nouveau quartier remporte un grand succès auprès de l’entourage politique de Louis XIV qui s’y installe. La partie sud de la rue, située de part et d’autre de la butte, devint un objet de spéculation après l’aplanissement des lieux vers 1667 à l’initiative de l’entrepreneur Villedo. Au XVIIIe siècle, le quartier subit la concurrence du faubourg Saint-Germain, ce qui entraîne alors l’abandon de nombreux hôtels et l’apparition de maisons de rapport, surtout dans la partie nord de la rue Sainte-Anne. Ce déclin se prolonge au XIXe siècle. Le percement de l’avenue de l’Opéra sous le Second Empire tronçonne la partie sud de la rue et entraîne la démolition de nombreux bâtiments. Il faudra le lent travail des historiens, notamment de la Commission du Vieux Paris, pour que l’on redécouvre et réhabilite ce quartier qui a préservé sa physionomie d’origine.
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